Jésus-Christ est-il le Fils de Dieu? Traduction: Elisabeth Meurer
Dans le dernier numéro de l´EINSICHT, j´avais déjà posé la question de la possibilité de reconnaissance de Jésus-Christ comme Fils de Dieu, comme le „Verbe“ qui a pris la chair, qui s´y est vidé, c´est-à-dire qui est devenu homme. „Et incarnatus est de Spiritu Sancto ex Maria virgine: et homo factus est“, comme nous l‘ enseigne le Credo.
Afin de pouvoir vérifier cette affirmation, qui nous a été transmise par la tradition de l´Eglise – Ecriture et vie de l´église (tradition au sens strict), j´ai posé l´hypothèse suivante:
„Il doit y avoir un moment dans la tradition, un moment génétique, qui me montre l´accès à la personne absolue, qui doit alsor aussi se montrer, se révéler. Le problème de la recherche de Dieu pour chaque personne esst le suivant: la foi est une grâce, que je ne connaîtrais pas sans l´action de Dieu. Dieu doit donc se montrer à moi, s´ouvrir à lui-même comme Dieu en tant que personne, avec qui j´entre en contact lorsqu´il entre en contact de son plein gré (Evangile de Jean)“.
Comment répondre à la question de la possibilité de reconnaître Jésus-Christ comme Fils de Dieu, à quelles conditions cette reconnaissance est-elle liée, peut-on montrer ces conditions? La réponse à cette question est d´une grande actualité.
S‘ il y a un développement qui façonne de manière décisive notre situation spirituelle et culturelle, notre monde séculier parfaitement formé, c´est bien la perte rampante de la foi dans le „Verbe incarné“. Cette foi en Jésus-Christ, qui après tout constituait encore la base sur laquelle Luther s´appuyait, s´est évaporée comme les „gouttes de rosée dans le soleil du matin“; … avec toutes les conséquences qui accompagnent cela. Pour être clair: si nous ne répondons (ne pouvons pas répondre) à la question de la reconnaissance du Christ comme Fils de Dieu, nous n´avons pas le droit de rejeter d´autres religions. Car si nous ne pouvons nous référer qu‘ à la simple transmission des contenus de la foi qui, contrairement à l´Islam, sont historiquement assurés, alsor qu´avec l´Islam la question de l´origine du Coran et de l´autenticité de la Vita de Mahomet est incertaine, comme l´assurent les spécialistes de l´Islam de provenance occidentale, nous devons leur permettre de s´appuyer aussi sur leur tradition.
La déclaration succinte de St. Jean: „Il es venu en sa possession, mais les siens ne l´ont pas reçu“ (Jn 1, 11), qu´il a faite à propos du refus des Juifs de reconnaître le Messie et de le recevoir comme tel, est particulièrement vraie à notre époque sécularisée. Il est possible que le manque de conviction de la foi ait également été la raison de l´adoption des documents hérétiques „Lumen gentium“, „Dignitatis humanae“ et „Unitatis redintegratio“, au Concile Vatican II. Dans le Concile Vatican II, les autres religions (entre autres le judaïsme et l´Islam) se voient également attribuer l´efficacité pour le salut et la reconnaissance.
Le rejet du Christ en tant que vrai Dieu est également évident dans la vie de tous les jours. Elle est de moins en moins orientée vers l´accomplissement de problèmes spirituels, moraux, mais plutôt vers la mise en oeuvre d´intérêts matériels, au mieux encore humains. Ainsi, la visite d´une église se déplace de plus en plus vers la visite d´un restaurant coûteux, où les plaisirs d‘ un „chef étoile“ prennent un caractère quasi liturgique. Transféré en Bavière, cela signifie: le visiteur de la „montagne sainte“ d´Andechs, le lieu de pélérinage le plus célèbre d´ici, ne se rend plus à l´église avec les miracles d´hosties, mais reste bloqué dans l´auberge prochaine.
Entre-temps, certains ont reconnu l´importance de répondre à cette question. Ainsi, l´ancien ministre fédéral du travail et des affaires sociales Norbert Blüm a déclaré le 14 octobre 2013, lors d´un débat public à la télévision ARD sous la direction du modérateur Günther Jauch, que les positions théologiques controversées actuelles ne pouvaient être clarifiées que si l´on répondait à la question décisive de savoir si le Christ est le Fils de Dieu, si Dieu s´est réellement révélé.
Entre-temps, la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X a également publié une brochure qui traite également de la question: „Jésus-Christ, est-il le Fils de Dieu?“ (pius.info, Stuttgart 2013) et y répond en énumérant les sources qui prouvent l´existence historique du Christ et en montrant l´autenticité des évangiles. L‘ accomplissement des prophéties du Christ dans l´Ancien Testament est également cité comme preuve de la vérité de la révélation divine en Jésus-Christ, tout comme les propres témoignages du Christ sur sa mission terrestre. Mais ces témoignages sur et du Christ ne font que confirmer ce que la tradition en tant que telle nous réserve. La question cruciale de savoir ce qui me donne le droit de dire que le Christ est le Fils de Dieu n´a malheureusement pas de réponse.
Cela n´est pas surprenant, car avec ce problème, nous entrons en territoire plus ou moins nouveau dans la philosophie de la religion. Et je demande que mes remarques sur ce problème ne soient considérées que comme une tentative de parvenir graduellement à une solution. Je suis ouvert à toute objection qui, je l‘ espère conduira à und clarification supplémentaire de la question de l´apparition terrestre de Dieu.
Les (simples) transmis – l´Ecriture et la tradition – fournissent une connaissance complète de la personne du Christ et de lui – tout comme d´autres témoignages historiques, mais ils ne constituent pas en eux-mêmes la base pour pouvoir dire avec conviction qu´il est le „Verbe fait chair“ (Jean 1,1 ss.).
Si, toutefois, l´affirmation de l´incarnation peut être justifiée par la reconnaissance, alors le matériel traditionnel doit contenir un moment qui est de nature telle que cette affirmation peut être justifiée, resp. il doit y avoir des raisons d‘ y répondre. J´ai déjà qualifié ce moment de „génétique“. D‘ une part, il doit être ancré dans la tradition, mais d´autre part, il doit la dépasser. Il doit montrer que sa propre dignité est absolument valable en soi, tant sur le plan formel que sur le plan du contenu.
D‘ une part, il est transmis comme un moment de tradition – de personne à personne, mais d´autre part, chacun doit faire l´expérience de cette illumination du moment génétique, c´est-à-dire de l´être divin. L´Ancien Testament parle du Dieu d´Abraham, d´Isaac et de Jacob. Cela ne signifie pas que nous parlons de trois dieux – un pour chacun – mais que chacune des ces personnes a eu son expérience de Dieu.
Ce moment doit – vu formellement – comme il devrait/doit dépasser le niveau d´une simple divinité affirmée, non pas être apporté de l´extérieur ou par autre chose, mais doit témoigner pour lui-même. Car Dieu n´est pas seulement un être, mais une exigence absolue de devoir, qui à son tour exige son accomplissement absolu, c´est-à-dire un devoir qui exige aussi son être. Il doit apparaître dans son témoignage comme ce qu´il doit être et il doit être ce qu´il apparaît. Dans l´Ancien Testament, Dieu témoigne de lui-même en disant: „Je suis celui qui je suis“, „Ego sum qui sum“ (Ex. 3, 14) Pour remplir cette structure formelle de contenu, nous devons nous rabattre sur ce que nous rencontrons dans les témoignages traditionnels: la volonté du Christ, qui non seulement offre à l´humanité son amour comme volonté à l´union d´amour, c´est-à-dire dans une volonté commune, mais qui par sa mort expiatoire veut nous sortir de notre enchevêtrement dans le péché et nous rendre à nouveau conciliables avec lui, si seulement nous acceptons son offre. C´est-à-dire que nous apprenons l´amour de Dieu et sa gentillesse, en payant lui-même les péchés des hommes comme s´ils étaient les siens. „Le Christ est devenu un péché pour nous“ (2 Cor. 5, 21).
Que doit-il se passer maintenant, pour que, dans cette Vita, je parvienne à l´ascension vers la compréhension que dans cette Vita, on montre maintenant vraiment Dieu, qui agit de cette façon et pas seulement une personne sainte (terrestre)? Par exemple, quand je lis la biographie de St. François. Quand j´étudie St. François, je découvre sa sainte action, mais pour cela je ne parle pas de lui comme de Dieu. Il en va de même pour tous les saints, pour le saint curé d´Ars ainsi que pour le saint Don Bosco, qui à mes yeux était l´un des plus grands génies pédagogiques. Quelle est la différence entre les témoignages volontaires et sacrés de ceux qui ont été conduits au Christ? Formellement parlant, cela signifie que ces personnes, dans leurs efforts pour vivre une vie sainte, ne se réfèrent pas à elles-mêmes comme raison de leurs actions, mais plutôt à l´exemple, au modèle du Christ, dans leur rôle de disciple, dans l´imitation du Christ. Ils essaient d´unir leur volonté à celle du Christ, de se conformer à celui-ci. Ce serait point un: que les personnes saintes ne se sanctifient pas par elles-mêmes, mais en se référant à Jésus-Christ.
En termes de contenu, cependant, il doit être tel que je vois dans la volonté du Christ l´action absolument sainte qui m´est révélée dans sa vita, c´est-à-dire dans l´étude de l´Ecriture Sainte ou dans l´amour d´une autre personne qui me conduit au fond de son amour. Donc, si ma connaissance du Christ doit dépasser celle de l´horizon historique, c´est-à-dire que je ne vois pas en lui une personne particulièrement sainte, comme l´a fait Arius, alors quelque chose doit s´éclairer pour moi en et de la manière dont le Christ est présenté dans les sources (de la tradition) dans lesquelles le Christ se montre comme Dieu et se témoigne comme tel. Lorsque cette vision s´accomplit, alors le Christ apparaît comme Dieu tel qu´il est, et il est tel qu´il apparaît: comme l´amour absolu, qui dans l´amour de l´expiation réalise sa propre exaltation et qui maintenant brûle aussi en moi, dans mon coeur.
Ce serait la réponse à la question posée au début: „Le Christ est-il le Fils de Dieu?“, au moins dans les grandes lignes.
Je vais jeter un autre coup d´oeil sur les saints. Ils ont cherché la perfection dans leur vie, ils ont progressé du point A au point B, d‘ une vie impie (St. François) à une vie qui s´est sanctifiée. Dieu, en revanche, doit apparaître, doit témoigner de lui-même comme le principe absolu de cet amour, qui ne connaît pas de devenir.
Notabene: Je remarque ici que le professeur Ratzinger, dans sa christologie, parle du Christ comme du Fils de Dieu, parce qu´il a complètement adapté la volonté du Père. Mais ainsi, la différence fondamentale entre l´accomplissement de la volonté de Dieu, comme le font les saints, et la révélation de l´amour absolu par et en Jésus-Christ est abolie et le Christ est présenté comme un dieu en devenir, ce qui fait que Ratzinger se présente au moins comme semi-arien (Cf. également Wigand Siebel: „Sur la position théologique du Cardinal Ratzinger – Ratzinger est-il un arien?“ dans EINSICHT no. 6 du mois d´oct. 2005).
L´identité de l´être et de l´apparence en tant que condition formelle de la compréhension aspirée de l´être divin du Christ est rattrapée en termes de contenu par la vue du devoir absolu qui témoigne de soi-même et qui se révèle à moi de manière vive (compréhensible). Ici aussi, il devient clair pourquoi la foi est toujours un acte de grâce, c´est-à-dire le don gratuit de Dieu, le don qu´il fait à ceux qui viennent à lui.
En même temps, cette compréhension exige qu´on la reconnaisse comme valable, d´où devrait émerger la conviction de la foi et à partir de laquelle je suis appelé à façonner ma vie
(EINSICHT de déc. 2013, no. 4, p. 114-117)
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