BREVES OBSERVATIONS SUR LES SACRES EPISCOPAUX CELEBRES PAR MGR. NGO-DINH-THUC ET MGR. MOISES CARMONA
par Eberhard Heller (trad. par Andre Perlant)
Differentes, questions qi ot été posées et des objections élevées eontre 1es sacres épiscopaux célébrés l'année dernière par Mgr Ngo-Dinh-Thuc, et recémment par Mgr Moise Carmona - que 1'on se réfère aussi aux vues exprimées dans la présente 1ivraison par M. le Recteur Othon Braun, auteur de la "Lettre ouverte" - me donnent l'occasion de faire quelques remarques à ce sujet et sur sa genèse. Je me reporte done un peu en arrière.
Pour bien comprendre et apprécier ces événments qui ont en lieu 1'an "an dernier à Toulon, cette année au Mexique et aux E. U.., et qui ont ému beaucoup de personnes, il est nécessaire d'avoir en mémoire l'état de la religion et de l'glise, tel qn'il se présentait antérieurement dans les années 60 et au début des années 70:
1. Un hérétique (ou apostat), prétendu Pape, et occupant la chaire de Pierre 2. L'écrasante majorité du clergé enfoncée dans l'apostasie ou l' hérésie; 3. Un nouveau rite remplaçant la Messe, invalide et obligatoire; 4. Des rites sacramtels invalides, ou pour le moins douteux; 5. Des rites d'ordination invalides, ou pour le moins douteux; 6. Destruction continue des dogmes de la Foi; 7. Destruction continue des fondements de la morale catholique ou leur miseaux oubliettes.
Si, par la miséricorde divine survenait un recours, aI.ors seulement l'Eglise serait sauvée de la Révolution partie du sommet et qui menaçait de la ruiner de fond en comble. En effet :
a) Sans la vraie Foi il n'y à pas de voie de salut, b) Sans les sacrements il ny à pas, concrètement de viatique vivant pour cheniner jusqu'à Dieu. c) Sans l'offrande du St. Sacrifice propitiatoire, pas de réconciliation avec le Créateur, pas de liens d'amour nous reliant directement à Dieu. d) Sans hiérarchie, l'Eglise cesse d'être l'institution qui offre par ses sacrements les moyens du Salut. e) Sans sacrement d'ordination valide, interruptiou de la succession apostolique.
Ce qui, dans ces conditions, resterait de l'Eglise fondée et envoyée en mission par le Christ, serait une prétendue Eglise qui ne serait ni une, ni sainte, ni catholique, ni apostolique. Ce qui resterait serait une secte de la pire espéce.
Après qu' il fut devenu manifeste que cette révolution provenait du sommet, que lea mutations hérétiques de la doctrine et des rites survenaient parce-qu'il les avait expressément voulues, alors se posa la question de savoir si Paul VI était un pape authentique. Les premiers à étdier ce problème comptaient parmi eux le R.P. ET Dr. Joachim Saenz y Arriaga au Mexique et le Dr. Hugues Marie Kellner aux Etats-Unis: ces deux docteurs, en particulier, traitèrent la question avec réalisme et precision. Elle fut étudiée dans EINSICHT, partir da premier cahier, publié en avril 1971, par divers auteurs, alorsque, simultanément M. François Bader se livrait à un examen minntieux du prétendu Novus Ordo Missae.
Ce faisant les points suivants furent conséquemment supputés:
1. Comment l'Eglise, en tant qu'institution, peut-eIle être sauvée ? 2. Comment le Saint Sacrifice de la Messe peut-il être sauvegardé ? 3. Comment la proclamation de la vraie doctrine peut-elle être garantie? 4. Comment la succession apostolique peut-elle etre assurée ?
Toutes les interrogations ainnsi dénombrées ne furent pas seulement traitées en theorie, mais on s'attacha aussi, malgré des forces limitées, à faire concrètement avancer leur solution, mais cependant, et celà se comprend, sans le dire ouvertement.
Comment aurait dû se comporter l'Eglise dans la arise déclenchée par l'infidélité de la "tête" ? Normalemet si un 'pape' est impliqué dans une hhérésie, un "conventus" (conci1e *)le déclare disqualifie, comme celà s'est produit assez souvent dans l'histojre de l'église.
Hérétique et papal sont par essence des termes opposés. Le pape hértique est autamitique disqualifié, il s'est détruit 1ui-même. ("Papa haereticius est depositus" dit St. Robert Bellarmin et idem Suarez). Mais comme l'Eglise n'est pas seulement une société unie directement et spontanément par la Foi, mais aussi ie société visible et organise juridiquemnet., il faut qu'un "papa" haereticus soit déposé publiquement, au vu et au s de toute 1'Eg1ise ("Papa haereticus est deponedus" dit St. Gaétan, et idem Jean de St. Thomas.)
Il faut donc établir devant 1'Eg1ise que le "pape" est tombé dans 1'héresie : c'est ce que faisait normalement le Convents (convoqué jadis par 1'empereur** en sa qualité de protector Ecc1esiae). Cette convention c'etait en principe celle de l'assemblée des cardinaux, restée orthodoxe. Elle proclamait que l'hérétique (s')était (1ui-même) déposé, ei procédait sur le chaump à 1'élection d'un nouveau pape. Ensuite le premier travail de 1'élu était de condamner la nouvelle hérésie ainsi que les hérétiques.
Le mystère d'iniquité de notre temps à ceci de particulier: le chaos religieux n'a pu être résolu pendant la dernière génération. Tous les clercs en activité, ou presque, ont apostasié, si bien que le "conventus" qui aurait: pu faire face sérieusement à son devoir, ne stest pas réuni. Depuis 1963, année où Montini à refusé la tiare, la papauté à disparu; l es occupants succcesifs ont confirmé la vacance ininterrompue du Saint Siège. (On pent disputer sur le fait que Montini était, ou n'était pas hérétique au moment, avant on après son installation sur le Siege; la situation réelIe n'est pas modifiée par le dép1acement de la date du début de la vacance.)
Malgré la publication du "Liber accusationis" de l'abbé de Nantes et, plus récemment de la "Declaratio " de S. E. Mgr Thuc qui ont fait connaître cet état de chose, le clergé reste orthodoxe n'a fait aucun effort pour mettre fin à cette situation. La majeure partie du clergé et des croyants qui se veut fidèle à la tradition, se trompe radicalement sur l'ampleur de la catastrophe spirituelle et religieuse qui nous à tous engloutis; elle laisse tout flotter à vau l'eau. La responsabilité de cette passivité incombe principa1ement au clergé européen orthodoxe et attaché à la Tradition : il s!est dérobé en sa totalité (sauf exceptions)! C' est ce qu'il ne faut pas oublier. Chacun ne voit que son portemonnaie, ne pense qu'à ses revenus. Partout la plus égoiste des recherches du bien- être! On est trop lâche, trop indolent, trop tartuffe, présomptueux, sans noblesse, sans confiance en Dieu, débile, vaniteux : ne rien entreprendre si on n'a pas confortablement assuré ses arrières !
Si quelque chose peut me remplir d'amtertume, ce'est bien la pensée de ce comportement perpétue l'element honteux, d'une infinie tristesse, toujours indigne et déshonorant des ecelésiastiques européens soi-disant o'rthodoxes. Il m'arrive souvent de voir rouge lorsque on vient me faire l'éloge de tel on tel prêtre," si pieux, si intrépide" ! La trahison des clercs, on la trouve en effet sous les formes les pins sublimes, au plan lé plus élevé : trahison par fainéantise, par veulerie, par inaction. Ainsi se perd le peu de confiance qui habitait encore les fidèles.
Nous étions donc confrontés à ce renoncement presque total des ecclésiastiques et surout des jeunes qui, pourtant, étaient bien éclairés sur la situation. Cex-ci faisaient de leur mieux pour torpiller les rares initiatives valables, car elles affectaient leurs intérêts privés. Face à cette inertie, il n'était pas possible avec le peu de forces prêtes à s'engager, d'entamer le processus sauveur qu'est la réunion d'un concil imperfait.
Parallelement, depuis le début de l'année 70, des efforts étaient. déployés pour sauver la succession apostolique, sans laquelle l'Eglise disp'araissait. Dans ce dessein nous presentîmes d'abord M. Lefebvre voudrait-il, vu l'urgence, ordonner un évêque ? (Nous ignorions alors le problème que pose sa propre ordinatin.) Il réagit cyniquement. Pius tard fut encore sollicité à cet effet de différents côtés. Bien qu'il déclinât de procéder à un sacre episcopal, il se risque ultérieurement jusqa'à évoquer la perspective d'un tel sacre, pour faire pression sur Rome, et ce, à plusieurs reprises, afin d'accélérer son rattachnent à la secte des apostats. - Je ne peux toujours pas m'imagier qu'une personne même demeurée primaire dans sa formation re1igieuse, médiocrement instruite en theologie (du niveau du grand catéchisme) ne parvienne pas à compendre que la position. de M. Lefebvre est intenable, parce-qu'etablie sur une contradiction donc illogique par nature. Les lefebvristes sont soit peu intel1igents, soit moralement déficients, soit même essaentiellement perverse. Honte à ceux qui, connaissant le rôie joué jar 1eur chef, I'ont aidé et contuent de l'encourager de leur soutien !
II eût été facile d'assurer la succession apostolique grace à des évêques Vieux-Catholiques qui furent nombreux à nous offrir leur concours. Cependant, même si l'on concède que leur propre sacre ait été valide, ce qui n' est pas garanti, le schisme de ces évêques ne 1eur donne aucun titre juridique à l'exercice de 1eur sacerdoce dans 1'Eglise. On ne peut leur demander les sacrements qu'in extremis, en danger de mort.
Par contre, en réponse à nos sollicitations, S. B. Pierre Martin Ngo-Dinh-Thuc, après notre premier long entretien, se déclara prêt à sacrer des évques, parce-qu' il voyait comme nous 1epéri1 mortel pour l'Eglise qui se faisait menaçant. Ainsi fut conclue la promotion de S.E. Mgr Guérard des Lauriers et celle de L.B Mgr Carmona et Mgr Zamora. C'est pourquoi - pour assurer la succession - Mgr Carmona, a sontour,`avec l'assistance de Mgr Zamora, à sacré cette année des prêtres nrexicains et nord-américains qui avaient résisté aux apostats avec beaucoup de détermination.
L es premieres ordinations épiscopales durent provisoirement se dérouler dans le secret et rester clandestines, exactement pour la même raison qui força Pie XII à faire ordonner des évêques dans le plus grand secret en Russie. Nous devions rester prudents, car Mgr Thuc était soumis à une surveillance de routine. Il y avait danger pour tous les participants, c'était evident ( et il y en à encore ). Cependant ce n'était pas la crainte qui nous faisait garder le secret - personne n'était dans l'angoisse - mais seulement le souci de réaliser effectivement les ordinations d'évêques. Si nous aviong procédé ouvertement I'autre camp aurait multiplié les obstacles pour empêcher la célébration des sacres.
Certaines réflexi.ons étaient dirigées ouvertement ou insidieusement contre nous et contre l'archevêque d'Annam:
Premiere objection: parce-que Mgr Thuc avait ordonné lee évêques de Troya, son ministère de consécrateur était disqualifié; la réponse est que le choix des aspirants à l'épiscopat obéit à des critères que le consécrateur juge en homme - C'est ce que Mgr. Thuc à fait. Il. à sacré 1es Troyens parce- qu'il avait des motifs de penser que ce choix pouvait grandement servir l'Eg1ise. Après coup on est toujours mieux avisé. Je n'ai jamais rencontré quelqu 'un qui, sur 1e tard soit; allé reprocher au cardinal Faulhaber d 'avoir choisi pour évêque Döpfner qui à exercé une grande influence (néfaste) comme "modérateur" de Vatican II. La science humaine n'exclut pas 1'erreur, on 1e voit dans 1'exemple Döpfner comme dane celui des Troyens. Et qui à sacré les autres évêques apostats? Qui les reproche à Pie XII*** ?
Deuxièmie critique:Mggr Thuc à été le chef de Palmar de TROYA. La réponse c'est qu'il ne l'a jamais été. Aussitôt apres les ordinations ils ont fait scission. Les Troyens lui doivent encore l'argent qu'il leur avait avancé pour le voyage.
Troisième objection: les sacres célébrés sans le consentemnent du pape sont illicites (cf. les canons 953 à 955 DU CODEX). En réponse il faut admettre que c'est vrai selon la lettre. Il y avait un groupe français, d'esprit catholique, qui des qu'il à été informé des sacres à violemment attaqué Mgr Thuc, parce-que les ordinations étaient illicites. ( Entretemps l es reproches se sont, après réflexion approfondie, transmués en vives suppliques pour obtenir un pape legitime.)
Face à une situation sans issue il faut faire toute clarté sur quelques points essentiels. Lé premier: que nous n'avons pas de pape pour donner le pouvoir juridique nécessaire à la creation de nouveaux évêques. S'il avait existé nous n'aurions évidement pas passé le Rubicon et empiété sur ses prérogatives. Le second point c'est que le but recherché n'était pas la violation du droit canonique, mais obeir à cet impratif qu'est le maintien de la succession apostolique. Lorsqu'un médecin doit porter secours à un patient il lui faut souvent passer outre aux cnvenances de la pudeur qu'i1 doit d'habitude respecter. Le dernier point c'est que 1e salut des âmes prime sur taute les lois : "Suprema lex salus animarum"**** Sans évque pas (d'ordination) de prêtres, sans prêtre pas de sacrement! Dane l'estimation de Mgr Thuc lai loi divine doit l'emporter sur une règle de l'adrninistration ecclésiastique si elles entrent en conflit, si la règle est, à tort, utilisée contre la loi suprême. C'est pourquoi St. Paul à ordonné des évêques pour I'Eglise sans que St. Pierre en eût été averti (à 1'avance), et Mgr Thuc à fait de même. Telles sont les motivations de ses initiatives. Si. cela est conforme au plan divin la succession apostolique est assurée, l'Eglise sauvée. Notons que pour prévenir le danger d'un nouveau schisme, les évêques mexicains exigent des aspirants à l'épiscopat de jurer fidelite à Mgr Thuc, come à leur primat provisoire
Il reste cependant à évoquer un problème qui restait et reste à résoudre à l'occasion de ce qui à été réalisé, problème qui vraisemblablement, incite, à juste titre, certains fidèles à rester sur une prudente réserve: quelle est la position canonique, quelle est la juridiction de Mgr Thuc? Mêmes questions concernant lee nouveaux évêques. S. E. Mgr Guerard des Lauriers, ancien professeur de théologie à l'université du Latran et qui s'est illustré dans la résistance aux imposteurs, a annoncé qu'il allait approfondir la question et nous publierons volontiers son étude. Si Mgr, pour une raison ou pour tine autre, ne pouvait aller jusu'au bout de son travail, nous nous attaquerions nous-mêmes à ces questions.
***
Notes du traducteur (André Perlant): * Ce "conventus" ou convention de représentants de l'Eglise se réunit de son propre chef et non sur convocation du pape, qui, n'existe pas selon les présomptions de 1'assemblée. C'est, dit-on, un "concile imparfait. Depuis Vatican I, on sait que le pape ne peut enseigner aucune hérésie. S'il. le fait, c'est un imposteur qui n'a jamais été pape. ** Il est sans doute fait référence à l'Eglise constantinienne et à l'empire romain. Les électeurs rassembes étaient les rerésentants de l'église locale de Rome, ce que les cardinaux étaient censés être (jusqu'aujourdhui). *** Peut-on, en effet, reprocher à N.S. J.C.(mutatis mutandis) d'avoir admis Judas parmi les douze apôtres ? **** Il s'agit de la quatrième des onze règles que Grégoire IX nous a leguées pour éviter les contre-sens dans l'application des lois canoniques. Mgr Moise Carmona nous à d'ailleurs rappelé que le canon 20 renvoit explicitement à ces règles pour chercher la solution des cas imprévus par la législation, qui ne manqueraient pas de se présenter.( Il faut ajouter à ces références pour temps de crise lee explications détailées de Boniface VIII.)
|