L'ÉGLISE DES DERNIERS TEMPS
par François Lagenos
Qui va gouverner l'Eglise Rescapée alors que les structurés bi-millénaires de la hiérarchie catholique sont occupées par l'Ennemi? Qui va la guider au nom de Jésus?
Cette question est maintenant devenue cruciale, car elle a reçu des réponses contradictoires de la part des ouailles qui ont réussi a échapper au Loup déguisé, lequel les fait rechercher par monts et par vaux par ses mercenaires. Dans le n° 16 de "Forts dans la Foi", le P. Barbara traite de l'élection du futur pape (pp 10 et 11). C'est un événement considérable, car le bouillant "Pied-Noir" nous faisait depuis longtemps attendre sa solution.
Nous connaissons déjà depuis trois lustres le prétendu projet de reconquête de Lefèbvre. Il s'agit dans un premier temps d'avoir recours au libéralisme de "Sa Sainteté" qui ne manquera pas (mieux vaut tard que jamais) de permettre à la Tradition d'établir une tête de pont dans la forteresse moderniste. La preuve sera alors faite que des pasteurs catholiques ne déciment pas le troupeau du Christ, mais le mènent dans les verts pâturages apostoliques, à l'abri des loups rapaces. Ceci, dans un deuxième temps, entraînera le retour du St Père et de nos loyaux évêques à la Vérité. L'expérience de la tradition que le clergé félon a tout fait pour étouffer suffira à le convertir.
Il y a aussi la solution des véritables "sedevacantistes" qui versent dans le légalisme. Il ne faut pas, disent-ils, changer un iota de la doctrine transmise impeccablement jusqu'à Pie XII. Il faut, en particulier, appliquer à la lettre le Codex mis à jour par Benoît XV. Leur maxime c'est "Sede vacante, nihil innovetur." Personne n'a donc le droit de sacrer un évêque; a fortiori, comme il n'y aplus d'évêques ou de cardinaux catholiques, nul, sinon Dieu lui-même ne peut choisir le futur pape. Les vrais catholiques n'ont plus ou'à assiéger le ciel de leurs prières: ils n'ont pas d'autres devoirs, pas d'autres ressources pour procurer un pasteur aux brebis errantes. Le P.B. n'est pas partisan de ce "laisser-faire" pieux. Il a parcouru le monde pour trouver au moins un évêque d'esprit orthodoxe qui accepterait de rompre avec K.W. -. La solution du P.B. au problème du pape introuvable et à l'occupation du St Siège par l'Ennemi est donc différente des réponses précédentes. Essentiellement le P.B. se réfugie dans une antique tradition, celle de l'élection du pape par le clergé romain. En effet le collège des cardinaux a été institué au Moyen Age pour exprimer la voix du clergé romain lors du choix de 1'évêque de Rome. Faute de cardinaux, il faut donc imaginer qu'une fraction des curés et chapelains de Rome va tôt ou tard se révolter contre l'usurpateur, et élire un évêque catholique pour diriger la renaissance de l'Eglise "urbi" et ipso facto "orbi".
Rien n'empêche le P.B. d'imaginer deux autre miracles qui viendraient épauler le premier pour assurer le sauvetage de l'Eglise.
a) La minorité conservatrice du collège "cardinalice" parvient à faire élire un des siens comme souverain pontife, car providentiellement la majorité anti-chrétienne se trouve divisée, frappée d'aveuglement.
b) Au moment même où les hérétiques le proclament successeur du défunt K.W., le nouvel élu abjure ses erreurs et condamne sans ambiguïté la religion satanique qui s'est installée. C'est pourquoi les rebelles de Rome, qui, en cette période d'élection, sont à la recherche d'un prélat catholique, le choisissent pour être leur évêque: ce faisant ils en font effectivement le successeur de St Pierre, et valident l'élection réellement nulle des pseudo-cardinaux.
Le dénouement imaginé par le P.B. semble édifiant. Pourtant il apporte de l'eau au moulin de Lefèbvre. Voilà le Vatican redevenu, sans coup férir le centre spirituel de la chrétienté: alleluia! Comme il était pénible d'errer à travers la Babylone moderne! Les tristes exilés sont de retour à Jérusalem, ils jubilent. Remarquons dans cette allégresse générale que le P.B. manie pour son propre compte le leurre que Lefèbvre ne cesse d'agiter pour attirer à lui les bannis: un jour nous reviendrons, disent-ils tous deux, dans nos belles églises où nos aïeux ont adoré Dieu et communié au Corps du Christ. (Concupiscit et deficit anima mea in atria Domini). Ainsi se fortifie l'utopie des lefèbvristes qui annoncent pour demain la disparition de la Rome moderniste.
Paradoxalement aussi, le P.B. rejoint les sedevacantistes qui ne veulent que d'un pape clairement désigné par Dieu. Telle est la deuxième curiosité des merveilles imaginées. Il est en effet humainement improbable que les prêtres romains ordonnés avant l'apostasie puissent songer un jour à se révolter en nombre non négligeable. D'abord leurs rangs s'éclaircissent à mesure que le temps passe et que la mort les fauche. Ensuite, après un quart de siècle de lavage de cerveau en toutes occasions, la doctrine catholique devient pour eux unvague souvenir de jeunesse. Enfin, voilà des prêtres qui dans leurs vertes années, ont accepté de renier la religion dont ils étaient pétris.Ils ont montré un degré de poltronnerie et un manque de conviction extrêmement graves. Ce ne sont pas des saints, qui, seuls, savent sacrifier leur confort même quand arrive l'hiver de leur vie. Ils suivent donc la loi générale qui fait que la vieillesse nous rend douillets et nonpas intrépides.Ce n'est pas au moment où ils chaussent leurs pantoufles qu'ils vont declarer la guerre à l'envahisseur.
Tout ceci s'applique avec encore plus de rigueur aux évêques, car ils sont forcément plus âgés. Ils sont tout au plus velléitaires. Le P.B. le sait bien puisqu'il les a personnellement exhortés à se ressaisir, mais en vain. Quelques prêtres sans grade ont sans doute réussi à se détacher de la Rome apostate, nul évêque n'y est parvenu, même pas Mgr Castro-Mayer. Il n'y a qu'une seule exception, celle de Mgr Thuc. C'est une grâce inouïe qui lui a été réservée, peut-être a cause du martyre des membres de sa famille et aussi à cause du bienheureux Théophane Vénard qui a arrosé de son sang la terre du Tonkin. Nos évêques sacrés sous Pie XII collaborent depuis 26 ans avec les antichrists qui se succèdent au vatican. Tous, autant qu'ils sont, devraient battre leur coulpe avant d'accuser K.W.... Leur culpabilité leur conseille de fermer leurs yeux devant la Vraie Lumière.
Il est donc encore plus rigoureusement exclus que l'église maçonnique puisse se convertir en masse. Dieu n'est pas au service des marchands d'illusions. Lefèbvre et Barbara n'y peuvent rien, malgré leurs palinodies. Dieu ne s'est jamais soucié de ramener les sectes dans la Voie de la Vérité. Il ne l'a pas fait pour les sectes protestantes! Pourtant elles ont séduit le tiers des chrétiens. Or dieu ne change pas. Mais il ya d'autres preuves que les rêves éveillés que fait le P.B. vont à 1'encontre des desseins de Dieu.
Il est en effet intéressant de constater que dans la solution proposée par le P.B. le vrai pape serait le cardinal Siri, évêque de Gênes. Certes Siri n'est pas présenté comme le seul papabile du moment, mais il est le seul survivant parmi les évêques élevés au cardinalat par Pie XII. Cela signifie-t-il que le P.B.reconnaît enfin que Roncalli est le premier imposteur franc-maçon a s'être emparé de la chaire de St Pierre, réeussissant enfin ce que Rampolla n'avait manqué que d'un cheveu en 1903? C'est à tout le moins une subtile précaution légale pour asseoir la légitimité de l'élu. Néanmoins, même après cette insinuation, le P.B. ne nous fera pas croire que Jésus peut faire de Siri un second Saul de Tarse, digne d'être terrassé par sa grâce. Du point de vue mystique c'est un contre-sens. Saul sur le chemin de Damas ne se préparait pas à composer avec les artisans de sacrilèges; il n'était nullement un chien de garde de Jéhovah devenu muet devant l'imposture. Certes il allait à Damas pour persécuter Jésus; mais bien que frappé de la cécité du peuple élu, c'était un juif droit, de bonne foi, qui n'avait jamais refusé de s'engager en faveur delà Vérité. C'était un pharisien sincère et zélé. Car si Jésus a changé son ennemi en apôtre, il n'a jamais fait appel aux services d'un renégat. C'est pourquoi le Saint-Esprit nous a éclairé par la bouche de Paul IV: il n'y aura pas aujourd'hui un nouveau miracle syrien. Siri ne sera pas un autre saint Paul, et certainement pas un successeur de St Pierre.
Même si le cardinal Siri se convertissait, il y aurait toujours un abîme spirituel entre lui et la charge de vicaire de Jésus pour tout l'univers. Cela ressort de la célèbre Bulle "Cum ex apostolatus officio" que Paul IV édicta en 1559 sous l'inspiration de l'Esprit Saint. Cette Bulle précise pour tous les temps à venir qu'un ancien renégat ayant un jour pactisé avec une quelconque hérésie ne pourra jamais devenir successeur de St Pierre, même s'il est élu à l'unanimité par les cardinaux. Rien ne pourra valider son élection; pas même le temps passé sur le siège de Pierre avant que son ancienne déviation ne soit connue. Or le cardinal Siri participe sans protester à l'apostasie déclarée des pseudo-papes. Il doit par conséquent être solidaire de leurs erreurs devant le Saint-Esprit et devant le peuple chrétien. Il ne peut, malgré la préférence de Barbara, être candidat au souverain pontificat.
Comment le P.B. en est-il venu à proposer une utopie aussi manifeste aux chrétiens démoralisés, désertés par leurs pasteurs? Pourquoi ne les invitet-il pas à travailler avec la lignée apostolique sauvée par Mgr Thuc?
Au contraire il combat l'archevêque de Hué qu'il trouve schismatique et donc excommunié. Voilà pourquoi le P.B. en est réduit à aller chercher le vicaire du Christ dans la contre-église. Il espère un triple miracle, d'ailleurs d'avance condamné par la Tradition, qui ramènera à Dieu le royaume où règne 1'antichrist K.W.... Mais il ne peut nous tromper: Rome restera ce qu'elle est devenue conformément aux Ecritures, la moderne Babylone, la grande prostituée qui chevauche la Bête de l'Apocalypse.
Si une partie du clergé romain devait se révolter, elle ne pourrait en fait trouver des évêques catholiques que là où la Providence les a suscités et implantés, par exemple à Acapulco, à Houston ou à Rochester. Quoi qu'il en soit, quoi que fasse le clergé romain, réduit par Satan en esclavage, l'Eglise des derniers temps peut désormais survivre et se développer... Elle ne peut que souffrir du fait des fabulations du Père Barbara.
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Note:
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